"Rien, moins que rien, pourtant la vie." Aragon

A la découverte de la beauté et de la vie ...

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jeudi 6 mai 2010

Douce Glycine ...


Enlaçant le bois millénaire
Des grappes dégoulinent
Telles des gouttes mauves et parme
La glycine parfumée et envoutante
Tisse ses larmes et ensorcelle.



Après mon modeste poème, je partage un très beau texte du poète belge Emile Verhaeren.

La glycine est fanée et morte est l'aubépine

La glycine est fanée et morte est l'aubépine ;
Mais voici la saison de la bruyère en fleur
Et par ce soir si calme et doux, le vent frôleur
T'apporte les parfums de la pauvre Campine.

Aime et respire-les, en songeant à son sort
Sa terre est nue et rêche et le vent y guerroie ;
La mare y fait ses trous, le sable en fait sa proie
Et le peu qu'on lui laisse, elle le donne encor.

En automne, jadis, nous avons vécu d'elle,
De sa plaine et ses bois, de sa pluie et son ciel,
Jusqu'en décembre où les anges de la Noël
Traversaient sa légende avec leurs grands coups d'aile.

Ton cœur s'y fit plus sûr, plus simple et plus humain ;
Nous y avons aimé les gens des vieux villages,
Et les femmes qui nous parlaient de leur grand âge
Et de rouets déchus qu'avaient usés leurs mains.

Notre calme maison dans la lande brumeuse
Etait claire aux regards et facile à l'accueil,
Son toit nous était cher et sa porte et son seuil
Et son âtre noirci par la tourbe fumeuse.

Quand la nuit étalait sa totale splendeur
Sur l'innombrable et pâle et vaste somnolence,
Nous y avons reçu des leçons du silence
Dont notre âme jamais n'a oublié l'ardeur.

A nous sentir plus seuls dans la plaine profonde
Les aubes et les soirs pénétraient plus en nous ;
Nos yeux étaient plus francs, nos coeurs étaient plus doux
Et remplis jusqu'aux bords de la ferveur du monde.

Nous trouvions le bonheur en ne l'exigeant pas,
La tristesse des jours même nous était bonne
Et le peu de soleil de cette fin d'automne
Nous charmait d'autant plus qu'il semblait faible et las.

La glycine est fanée, et morte est l'aubépine ;
Mais voici la saison de la bruyère en fleur.
Ressouviens-toi, ce soir, et laisse au vent frôleur
T'apporter les parfums de la pauvre Campine.






















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4 commentaires:

LE CHEMIN DES GRANDS JARDINS a dit…

J'ai découvert en Bretagne, des caps entièrement plantés de bruyères multicolores. C'était sur la presqu'ile de Crozon. Et ces plantes modestes avaient résisté aux vents aux embruns, aux pires tempêtes pour magnifier ces sites. Elles avaient choisi les pentes les plus escarpées, vivant chichement sur une poignée de terreau, pour orner cette terre du bout du monde, le Finistère.De véritables palettes de peintre s'offraient à nos yeux pour notre plus grand plaisir, sous un soleil resplendissant ce jour là. J'ai toujours aimé ces plantes pour leur caractère rustique et affirmé. Voilà à quoi me font penser ces bruyères sur cette photo.
Les glycines ne me sont pas indifférentes mais j'en parlerai une prochaine fois.

Roger

Anne Dijon a dit…

Merci de tout coeur de votre passage. Je me rappelle la presqu'ile de Crozon. Nous y sommes allés il y a près de 40 ans. ... Cela date, mais je garde un souvenir magnifique de ce pays "du bout du monde".
Ici les bruyères poussent dans notre jardin.

mAnaniya, a dit…

Ah la glycine au parfum suave et sucré qui, avec le mimosa, a enchanté la tonnelle du jardin de mes jeunes années !!!
Mes "madeleines" à moi ...
"Ô beau pied de glycine
Qui rampes sur le toit !
Glycine en fleurs, tendre glycine – bleu pavois
Des grilles, des balcons, des murs trop neufs, des toits
Trop vieux – souple glycine !
Ce matin, sous le ciel frémissant comme toi,
C’est dans tes grappes et tes feuilles,
Tout le miracle bleu du printemps qui m’accueille !
En papillons, du bleu s’effeuille…
Du bleu… du bleu nuancé de lilas,
De violet si doux qu’on ne sait pas
Si l’on voit des touffes d’iris ou de lilas.
Par terre est un champ de pétales.
Jacinthes, violettes pâles ?
Non, mais, en l’air, une guirlande qui s’étale,
Qui s’effrange, qui glisse en gouttes de satin …
Il pleut mauve. Il a plu cette nuit, ce matin.
La terre est mauve; l’herbe mauve. Le jardin
Est un jardin pareil à ceux que j’imagine
Autour d’un petit pont sur des lotus, en Chine.
Jardins d’Asie … Ombre au pied des collines,
Toits retroussés, bassins fleuris et murmurants …
C’est comme un frais bonheur inconnu qui me prend,
Un bonheur du matin, fait d’air si transparent,
De couleurs et d’odeurs si fines,
Qu’on y sent toute l’âme en fête des glycines !
Ô glycine, collier des gouttières chagrines,
Manteau léger du parc aux grands escaliers blancs
Et de la pierre des vieux bancs
Devant les chaumes en ruines ;
- Treille aux raisins d’azur, festons d’argent,
Vitrail d’évêque où chaque palme dessine
Entre des pendentifs d’améthystes, en rangs ;
Flocons d’encens, clairs sachets odorants,
Qui tombent sur mon front, sur ma poitrine,
Comme un présent de mai!
- Glycine,
Dont le nom grec veut dire : doux, douceur,
Vin sucré … dont le nom est comme une liqueur,
Comme un parfum dans la brise câline,
Dont le nom, doucement, glisse comme tes fleurs,
Je te salue au seuil du Bel Été, Glycine …"
Sabine Sicaud, Poèmes d’enfant,
Poitiers, Cahiers de France, 1926

Anne Dijon a dit…

Glycine et mimosa ... tendres fleurs aux couleurs essentiellement complémentaires pour le peintre, parfumées et envoutantes ...
Je les associe au sud de la France.
Merci de tout cœur chère Annick pour ce si beau partage de ce très beau poème chantant la glycine.